SARS-CoV-2 la piste animale

6 Avril 2023: Liu et al. Surveillance of SARS-CoV-2 at the Huanan Seafood Market. Nature 6 April 2023

Cet article est la version finale revue et corrigée par des pairs et publiée ce jour dans la revue Nature.

Résumé. Le SARS-CoV-2, l'agent causal du COVID-19, est apparu en décembre 2019. Ses origines restent incertaines. Il a été rapporté qu'un certain nombre des premiers cas humains avaient des antécédents de contact avec le marché aux fruits de mer de Huanan. Nous présentons ici les résultats de la surveillance du SARS-CoV-2 au sein du marché. À partir du 1er janvier 2020, après la fermeture du marché, 923 échantillons ont été prélevés dans l'environnement. À partir du 18 janvier, 457 échantillons ont été prélevés sur 18 espèces animales, comprenant le contenu invendu de réfrigérateurs et de congélateurs, des prélèvements d'animaux errants et le contenu d'un aquarium. La RT-qPCR a permis de détecter le SARS-CoV-2 dans 73 échantillons environnementaux, mais dans aucun des échantillons d'animaux. Trois virus vivants ont été isolés avec succès. Les virus du marché présentaient une identité nucléotidique de 99,99 % à 100 % avec l'isolat humain HCoV-19/Wuhan/IVDC-HB-01/2019. La lignée A du SARS-CoV-2 (8782T et 28144C) a été trouvée dans un échantillon environnemental. L'analyse RNA-seq des échantillons environnementaux positifs et négatifs pour le SARS-CoV-2 a révélé une abondance de différents genres de vertébrés sur le marché. En résumé, cette étude fournit des informations sur la distribution et la prévalence du SARS-CoV-2 sur le marché aux fruits de mer de Huanan au cours des premières phases de l'épidémie de COVID-19.


Partout ailleurs sauf chez nous !

Juste après avoir posté le texte ci-dessous ("Origine du SARS-CoV-2 : la piste animale revient"), j'ai retrouvé dans mes archives un article publié en août 2022 par Jon Cohen (Science 2022) dont je rapporte quelques paragraphes ici sur la position Chinoise sur l'origine de la pandémie de COVID-19. Cette position se résume en cinq mots : partout ailleurs sauf chez nous !

Clairement, cette position est en pleine cohérence avec les récents développements dont il est question plus loin dans ce post.

Depuis le début de la pandémie, le gouvernement chinois, à l'instar de nombreux chercheurs étrangers, a vigoureusement rejeté l'idée selon laquelle le SARS-CoV-2 serait né à l'Institut de virologie de Wuhan (le laboratoire P4, WIV) et s'en serait échappé. Mais au cours des deux dernières années, il a également commencé à s'opposer à ce que beaucoup considèrent comme le seul scénario alternatif plausible : La pandémie a débuté en Chine avec un virus qui est passé naturellement des chauves-souris à une espèce "intermédiaire", puis à l'homme, très probablement sur le site du marché aux fruits de mer du Huanan à Wuhan.

L'idée d'une pandémie née en dehors de la Chine est absurde pour de nombreux scientifiques, quelle que soit leur position sur la question de savoir si le virus est parti d'une fuite de laboratoire ou d'un saut naturel à partir d'animaux. Il est tout simplement impossible que le SARS-CoV-2 soit venu d'un endroit étranger à Wuhan et y ait déclenché une épidémie explosive sans avoir d'abord laissé des traces chez les humains sur son site d'origine.

Une étude dirigée par Zhou Zhao-Min, de l'Université Normale de Nanchong (Xiao et al. Scientific Report 2021, citée dans ce post) a recensé les mammifères vendus sur les marchés de Wuhan pendant les deux années précédant la pandémie, à la recherche de la source d'une infection transmise par les tiques. Entre 2017 et 2019, près de 50 000 mammifères étaient en vente sur ces marchés incluant le marché du Huanan. Ces résultats révélèrent l'erreur flagrante du rapport de l'OMS publié trois mois plus tôt qui stipulait qu'aucun mammifère n'était en vente sur le marché du Huanan (!!!). Les co-auteurs de l'article, Zhou et Xiao, ont tous deux été pris à partie par leurs institutions et réprimandés, et il leur a été demandé de cesser tout travail sur le commerce des espèces sauvages.

Mais cet article a omis un détail essentiel qui pourrait aider à clarifier l'origine de la pandémie : il ne précise pas si les chercheurs ont collecté des tiques - qui se nourrissent du sang des mammifères - ou s'ils ont prélevé des échantillons biologiques directement sur les animaux. Ces deux types d'échantillons pourraient être testés pour détecter la présence d'anticorps dirigés contre le SARS-CoV-2 ou de restes génétiques du virus lui-même, afin de déterminer quelles espèces animales l'auraient hébergé. La question a été posée à Zhou, mais en vain. Il a répondu qu'il n'avait pas le droit de répondre. Cette question était tellement évidente que quelqu'un du CDC chinois a dû la poser. Ce quelqu'un connaît certainement la réponse…

Quoiqu'il en soit, cet élément conforte amplement la suspicion que l'on peut avoir quant à la transparence dont font preuve les autorités Chinoises sur l'origine possible de cette pandémie.


Origine du SARS-CoV-2: la piste animale revient

Cette piste animale revient sur le devant de la scène après la découverte récente (mars 2023) que le CDC (Center of Disease Control) Chinois a volontairement caché ses données sur les prélèvements animaux réalisés en janvier 2020 sur le marché du Huanan à Wuhan.

 

Explications

Depuis trois ans, le débat sur les origines de la pandémie de coronavirus oscille entre deux possibilités :

  • le SRAS-CoV-2 (responsable de la COVID-19) s'est répandu dans les populations humaines directement à partir d'une source animale sauvage
  • le SRAS-CoV-2 s'est échappé d'un laboratoire.

Dans un contexte général de tentatives de dissimulation des données par les autorités chinoises, de politisation du débat aux États-Unis et de spéculations effrénées aux quatre coins du monde (sans compter les habituelles théories du complot), de nombreux scientifiques se sont tenus à l'idée que cette épidémie - comme la plupart des autres - avait des racines purement naturelles.

Mais il manque à cette hypothèse une preuve essentielle : des données génétiques provenant du marché du Huanan (Huanan Seafood Wholesale Market) à Wuhan, montrant que le virus aurait pu être transmis à des humains par des animaux en vente dans ce marché.

En effet, chiens viverrins (raccoons), rats bambous, civettes palmistes ne sont que quelques-uns des animaux dont nous avons maintenant la preuve qu'ils étaient présents sur le marché du Huanan associé à l'origine de la pandémie de COVID-19. Le problème majeur est que tous ces animaux sans exception ont été éliminés juste après la découverte de la pandémie entre le 31 décembre 2019 et le 1er janvier 2020.

 

Raccoon

Chiens viverins (raccoons)

Cette espèce animale vendue en Chine pour sa fourrure et sa viande est particulièrement sensible au SARS-CoV-2 (Freuling et al. Emerg Infect Dis 2020)

 

Deux prépublications récentes relancent le débat sur l'origine de la pandémie de COVID-19

Ce sont deux prépublications (non encore jugées par des pairs) récentes de Gao et collaborateurs (2022) et Crits-Christoph et collaborateurs (2023). Voici un déroulement chronologique de faits récents.

Janvier 2020

Après la découverte de la pandémie naissante, les autorités chinoises, en fait, le CDC (Center for Disease Control) et le Centre de Contrôle des Maladies du Parti Communiste (PC) Chinois, procèdent à des prélèvements au niveau environnemental : sols, égouts, cages, murs, portes, etc., dans tout le marché du Huanan de Wuhan après sa fermeture et l'élimination des animaux et produits d'origine animale le 1er janvier.

Début 2020 

Le CDC et le PC Chinois indiquent qu'aucun animal susceptible d'être infecté par le SARS-CoV-2 n'était en vente sur ce marché. Ceci explique qu'aucune donnée relative à des animaux ait été diffusée début 2020. Pourtant, comme on le verra plus loin, George Fu Gao membre du CDC et chef du Centre de Contrôle des Maladies du PC Chinois a déclaré à deux reprises dans des conférences de presse que, selon le CDC, des animaux en vente dans le marché du Huanan étaient responsables du départ de la pandémie (Wu, CDC Disease Control Report 2020).  

 Le 25 février 2022

Gao et collaborateurs déposent leur prépublication intitulée "Surveillance of SARS-CoV-2 in the environment and animal samples of the Huanan Seafood Market" sur la plateforme Research Square. Rappelons que George Gao dirigeait le CCDC jusqu'en février 2022. En bref, cette étude rapporte les points suivants :

  • le SARS-CoV-2 a été détecté dans les étals de la zone ouest du marché du Huanan
  • le SARS-CoV-2 n'a été détecté dans aucun des échantillons provenant d'animaux en vente sur ce marché
  • le marché aurait joué un rôle d'amplificateur en raison du nombre élevé de visiteurs quotidiens.

Autrement dit, Gao et collaborateurs affirment que le marché du Huanan n'a été qu'un site d'amplification d'une épidémie déjà très répandue et non le site de démarrage de la pandémie.

Le 26 août 2022 

Un article publié dans la revue internationale Science (Worobey et al. Science 2022) montre que les premiers cas de COVID-19 se concentrent sur le marché du Huanan. Pour ce faire, les auteurs ont utilisé les données relatives aux prélèvements environnementaux publiées en 2020 par le CDC Chinois. Ils montrent que les prélèvements testés positifs au SARS-CoV-2 se concentrent dans la partie sud-ouest du marché, partie dans laquelle des animaux sauvages était en vente depuis 2019. Ils concluent que l'émergence de la COVID-19 pourrait être liée à la vente d'animaux sauvages, ce qui renforce l''hypothèse selon laquelle le marché du Huanan serait l'épicentre de la pandémie.

Le 4 mars 2023 

Un consortium de chercheurs Nord-Américains, Européens (France, Belgique, Royaume Uni, Pays Bas) et Australiens, appelé "membres du consortium" dans ce qui suit, découvrent par hasard dans la base de données du GISAID des séquences nucléotidiques relatives à des d'échantillons environnementaux collectés sur le marché du Huanan. Cette découverte a été réalisée par Florence Débarre, chargée de recherche au CNRS, Institut d’écologie et des sciences de l’environnement de Paris, spécialiste de la modélisation des dynamiques éco-évolutives grâce au dialogue entre mathématiques et biologie (Médaille de bronze du CNRS 2022).

Le GISAID (Global Initiative on Sharing Avian Influenza Data) a été créé en 2006 par un groupe de chercheurs afin de favoriser le partage des données sur la grippe aviaire qui sévissait à l'époque. Il s'agit d'une plateforme donnant accès à une base de données (ADN, ARN) publique et gratuite. Le GISAID est par nature multinational et pluridisciplinaire, rassemblant des experts dans les domaines de la médecine, de la médecine vétérinaire, de la bio-informatique, de l'épidémiologie et de la propriété intellectuelle. Depuis 2020, son champ d'action s'étend au SARS-CoV-2 et à la pandémie de Covid-19.

Le 9 mars 2023 

Les chercheurs du consortium réalisent que ces données de séquences métagénomiques sont relatives non seulement à des prélèvements environnementaux, ce qu'on savait depuis 2020, mais aussi à des prélèvements animaux et humains. En particulier, de l'ADN mitochondrial qui permet notamment d'identifier les espèces animales présentes sur le marché a été retrouvé. Ces données constituent la base de la prépublication déposée en février 2022 sur la plateforme Research Square par George Fu Gao et collaborateurs (voir plus haut). Le même jour, ils contactent un auteur de la prépublication de Gao afin de s'enquérir des données, et il leur est répondu qu'ils peuvent faire une analyse indépendante à partir de celles qui sont publiées sur la base du GISAID.

Le 10 mars 2023

Les membres du consortium informent le même auteur qu'ils ont découvert sur la base du GISAID la présence de matériel génétique animal dans les échantillons, ce qui n'avait pas été publié par le CDC Chinois en janvier 2020.

Le 11 mars 2023 

Les membres du consortium découvrent que les données ont été retirées de la base du GISAID, à la demande de l'équipe Chinoise, selon le GISAID. Par chance ils avaient pu télécharger la plus grande partie des données la veille. Le jour même, ils contactent un des membres de cette équipe et lui demandent s'il souhaiterait collaborer avec le consortium sur l'analyse de ces données.

Pas de réponse de l'équipe Chinoise.  

Le 13 mars 2023

Les membres du consortium qui avaient téléchargé une partie des métadonnées du GISAID et qui avaient contacté l'auteur correspondant de la prépublication de Gao, sont accusés par le secrétariat du GISAID d'avoir enfreint les règles de la plateforme. Les membres du consortium répondent qu'ils connaissent parfaitement ces conditions d'utilisation, qu'ils ne les ont pas enfreintes et qu'ils n'ont pas l'intention de le faire. Ils soulignent de plus, qu'en permettant aux chercheurs Chinois d'imposer un embargo sur leurs données (pendant près de 8 mois - les données du CCDC sont enregistrées comme ayant été téléchargées le 2 juin 2022), le GISAID s'est écarté de sa mission d'indépendance et déclarée de surmonter "les obstacles et les restrictions dissuasifs, qui découragent ou empêchent le partage des données virologiques avant la publication officielle".

Les échantillons du marché du Huanan ont été collectés en janvier et février 2020 et, compte tenu de leur importance pour comprendre l'origine de la pandémie, les membres du consortium estiment que la publication des métadonnées génétiques, incluant des prélèvements animaux et humains, seulement en 2022 (plus de 2 ans après le début de la pandémie) est totalement déraisonnable.

Le 20 mars 2023

Crits-Christoph et collaborateurs déposent leur prépublication intitulée "Genetic evidence of susceptible wildlife in SARS-CoV-2 positive samples at the Huanan Wholesale Seafood Market, Wuhan. Analysis and interpretation of data released by the Chinese Center for Disease Control" sur la plateforme Zenodo. En bref, cette étude rapporte les points suivants :

  • les données de séquençage métagénomique accessibles au public sur le GISAID, fournissent des preuves de la co-occurrence du SARS-CoV-2 et du matériel génétique d'animaux sauvages sensibles au virus dans les échantillons environnementaux du marché du Huanan au début de la COVID-19
  • La présence de chiens viverrins (raccoons), une espèce particulièrement sensible au SARS-CoV-2 est attestée et il est à noter que cet animal n'est pas mentionné dans la prépublication de Gao et collaborateurs, qui ont pourtant déposé les données sur le GISAID
  • Ces données corroborent divers rapports publiés par des chercheurs Chinois selon lesquels des animaux hôtes intermédiaires putatifs du SARS-CoV-2 ont été vendus vivants sur le marché entre 2017 et 2019 (Zhang et al. Cell 2020; Xiao et al. Sci Report 2021)
  • Elles apportent des preuves supplémentaires identifiant le marché du Huanan comme le lieu probable de propagation du SRAS-CoV-2 et l'épicentre de la pandémie de COVID-19.

Wuhan market animal photos zhang et al

Le marché aux fruits de mer et à la faune sauvage du Huanan à Wuhan
La photographie (Zhang et al. Cell 2020) a été prise en octobre 2014 et met en évidence une grande variété d'animaux sauvages en vente,
ce qui constitue un puissant mécanisme de transmission des zoonoses. 

 

Autrement dit, Crits-Christoph et collaborateurs affirment que même si la preuve directe de l'infection des animaux par le SARS-CoV-2 n'existe pas (puisqu'ils ont été éliminés dès le 1er janvier 2020) ces animaux et notamment des raccoons étaient présents dans le marché du Huanan, au bon endroit, et au bon moment quand la pandémie a démarré. Une carte qui montre que la densité du SARS-CoV-2 était la plus élevée dans les zones du marché près des étals où ces mammifères étaient vendus est présentée ci-dessous (Crits-Christoph et al. Zenodo 2023; Worobey et al. Science 2022).

 

Plan du marche de huanan

Plan du marché du Huanan à Wuhan

Ce plan a été réalisé par Worobey et al. Science 2022. On peut voir que la zone (couleur rose) dans laquelle les prélèvements environnementaux ont été testés positifs pour le SARS-CoV-2 se concentre sur la partie Sud-Ouest du marché où les animaux de faune sauvage étaient en vente.

Résumé des prépublications de Gao et al. et de Crits-Christoph et al.

George Fu Gao et al. Research Square 2022

L'ARN du SARS-CoV-2 a été détecté dans les étals de la zone ouest du marché de Wuhan, ce qui suggère la prévalence du SARS-CoV-2 sur ce marché. Le marché pourrait donc avoir joué un rôle d'amplificateur en raison du nombre élevé de visiteurs quotidiens, à l'origine de nombreux groupes d'infection initialement identifiés au début de l'épidémie, comme l'indique le rapport de l'étude mondiale sur les origines du SARS-CoV-2 convoquée par l'OMS. En outre, des virus vivants du SARS-CoV-2 étaient également présents dans les échantillons environnementaux. Cependant, aucun SARS-CoV-2 n'a été détecté dans les échantillons d'animaux provenant du marché. Il est clair que des travaux supplémentaires impliquant une coordination internationale sont nécessaires pour étudier les origines réelles du SARS-CoV-2, surtout si l'on considère les résultats positifs au SARS-CoV-2 d'échantillons collectés en 2019 dans le cadre d'études rétrospectives menées dans différents pays. La surveillance des animaux sauvages à l'aide d'une approche viromique devrait être renforcée afin d'explorer les hôtes naturels et intermédiaires du SARS-CoV-2, ce qui contribuerait à prévenir de futures pandémies potentielles causées par des coronavirus d'origine animale ou similaires.

Alexander Crits-Christoph et al. Zenodo 2023

En utilisant des données de séquençage métagénomique accessibles au public sur le GISAID, nous fournissons des preuves de la co-occurrence du SARS-CoV-2 et du matériel génétique d'animaux sauvages sensibles au virus dans les échantillons environnementaux du marché du Huanan au début de la COVID-19. Cette découverte corrobore les rapports selon lesquels des animaux hôtes intermédiaires putatifs du SARS-CoV-2 ont été vendus vivants sur le marché à la fin de l'année 2019 et vient s'ajouter à l'ensemble des preuves identifiant le marché du Huanan comme le lieu de propagation du SRAS-CoV-2 et l'épicentre de la pandémie de COVID-19. Les données utilisées pour produire ce rapport ont été téléchargées de la base de données GISAID le 9 mars 2023, mais en ont été soustraites le 11 mars 2023. Au 20 mars 2023, ces données ne sont toujours pas revenues sur le GISAID. En outre, d'autres données métagénomiques relatives au marché du Huanan existent mais n'ont pas encore été partagées publiquement. Le partage de ces données est essentiel pour mieux déchiffrer la séquence des événements qui ont probablement conduit à l'émergence du SARS-CoV-2 sur le marché de gros de Huanan.

D'autres données de séquençage inexplorées émergeront-elles du marché ?  

Worobey et al. ont également trouvé sur le GISAID des échantillons pour lesquels les "fichiers de séquençage bruts" n'étaient pas disponibles. Le GISAID a indiqué dans son communiqué qu'une partie incomplète de ces données avaient été téléchargées et qu'un ensemble de données plus complet et mis à jour serait mis à la disposition de tous les utilisateurs du GISAID dès que possible. Mais le GISAID n'a pas précisé quand ces données pourraient être rendues publiques. Et c'est bien dommage, car toutes ces données manquantes pourraient fournir des informations précieuses sur la chronologie des événements survenus sur le marché du Huanan et sur la provenance du virus.

Que conclure de ces divers éléments ?

  • La co-détection du virus du SARS-CoV-2 et de l'ARN/ADN d'animaux sensibles dans les mêmes échantillons, dans la section Sud-Ouest du marché du Huanan identifie ces espèces, et en particulier le raccoon, comme le responsable le plus probable de l'émergence de la pandémie fin de 2019.
  • Diverses publications ont montré que le raccoon - couramment élevés pour sa fourrure en Chine, mais aussi pour sa viande dans des marchés comme celui de Wuhan - est susceptible d'être infecté par le SARS-CoV-2 et excrète des niveaux élevés du virus (Freuling et al. 2020).
  • L'ADN mitochondrial humain était plus abondant dans d'autres parties du marché où les prélèvements environnementaux étaient négatifs au SARS-CoV-2. Il est donc possible que les animaux aient transmis le virus aux humains dans la partie sud-ouest du marché plusieurs semaines avant que les échantillons ne soient prélevés, et que ces personnes aient depuis lors guéri de leurs infections. Dans ce scénario, les autres personnes infectées sur le marché l'ont probablement été par transmission interhumaine.
  • Même si les éléments présentés ici suggèrent - sans le démontrer réellement - que des animaux présents sur le marché étaient la source probable du SARS-CoV-2, cela ne modifie en rien le débat sur l'origine de la maladie, mais permet à la piste de l'origine animale de revenir sur le devant de la scène.  
  • Du fait que le CDC et le Centre de Contrôle des Maladies du PC Chinois ont publié ses données tout d'abord partiellement (uniquement sur les prélèvements environnementaux et non animaux), puis plus largement (données métagénomiques) avec deux ans de retard, et enfin les ont retirées tout récemment de la base de données du GISAID, on ne peut s'empêcher d'avoir un doute quant à la transparence dont font preuve les autorités Chinoises sur l'origine possible de cette pandémie.
  • Enfin, on ne peut que s'étonner des tergiversations de George Fu Gao membre du CDC et chef du Centre de Contrôle des Maladies du PC Chinois. Il avait annoncé les 22 et 26 janvier 2020 en conférences de presse que le virus provenait de la vente d'animaux sauvages sur le marché du Huanan, puis il s'est rétracté le 25 mai 2020 déclarant que le marché du Huanan avait été "une victime" de la pandémie et non sa cause (Wu, Chinese CDC Disease Control Report. 2020).

Sources bibliographiques

  • Cohen. Unearthed genetic sequences from China market may point to animal origin of COVID-19. Science 2023

  • Cohen. ‘It’s inexcusable.’ WHO blasts China for not disclosing potential data on COVID-19’s origin. Science 2023

  • Cohen. A new pandemic origin report is stirring controversy. Here are key takeaways. Science 2023

  • Mallapaty. COVID-origins study links raccoon dogs to Wuhan market: what scientists think. Nature 2023

  • Wu G. Report from the Chinese Center for Disease Control and Prevention’s Office of Virus Control and Prevention, Regarding the Results of Environmental Sample Testing for the Novel Coronavirus Epidemic in Wuhan. CDC Disease Control Report 2020

Date de dernière mise à jour : 06/04/2023

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